Je n'avais jamais lu Henri MICHAUX. Je ne connaissais que son travail de peintre.
Je viens de terminer Plume précédé de Lointain intérieur. (NRF- Poésie/Gallimard)
De courts textes (qu'on ne peut appeler nouvelles), des poèmes, des pièces de théâtre en actes d'une demie page, ce livre
n'est qu'une suite de très brefs scénarios.
Le titre de la première partie du recueil, « Entre centre et absence », nous éclaire sur cette
rapidité : il semble en effet que MICHAUX ait besoin d'aller à l'essentiel en enlevant, en évitant, en fuyant. Il nous plonge dans des univers magiques, fous, où tout, du décor à la
pensée, est jeté rapidement comme si le temps et l'espace étaient comptés à l'auteur pour dire ce qu'il a à dire.
Et pourtant, cela fait sens. Cela chemine vers ce que MICHAUX appelle « l'espace du dedans ».
Toute d'introspection, la poésie de MICHAUX est celle d'un espace plastique envahi par la présence décalée et humoristique de
l'homme au milieu d'animaux fantastiques, et soumis à des hallucinations (l'eau d'un robinet se transforme en cristaux qui coupent les bras) mais aussi et surtout -mais peut-être est ce une
de mes déformations professionnelles ?- déjà plein de visions internes en passe de jaillissement, de ces futures « griffures anthropomorphes » qu'il réalisera de façon
affirmée à partir des années 50 quand il portera plus son action sur la production plastique que dans l'écriture.
C'est évidemment l'écriture d'un visuel, d'un visuel interne, celui d'une condition humaine pleine de fragilité, dans
laquelle il nous est facile de retrouver l'ordinaire de notre humanité.
Voilà un extrait dans lequel je pense
pouvoir personnellement me retrouver...
« ...Dans la tempête, il entend le monde, comme il sonne vraiment. Oh ! Qu'il résonne étrangement ! Il le voit aussi, comme il est, jaune,
essentiellement jaune et mêlé d'un peu de boue et d'ocre.
Il est dans la trajectoire et la vie prend un tout autre sens. Chacun est après une
autre chandelle. C'est la poursuite vertigineuse, et il n'est pas de pont dans un tourbillon.
Son cœur se met à sauter comme une balle.
En sa poitrine, c'est à présent le barattement du lac de
l'émotion.
Comme des bulles, des horizons toujours nouveaux apparaissent, croissent, se dilatent,
crèvent, réapparaissent, s'étirent, se dilatent, et encore et encore... »
A lire comme
un voyage, introspectif, léger, drôle mais sans frivolité...jamais.
Copyright © Arthémisia - Juillet 2008
Avec : Henri MICHAUX - Sans
titre