1461 - Le Silence
Sur la mer étale nous flotterons en eau sage, apaisés de nos peurs et de toutes nos envies.
Mais où irons-nous? Quelles seront les reliefs, les montagnes et les gouffres, qui faisaient l'appétit rythmé de nos vies en mouvement? Où
trouverons-nous nos faims, nos lumières nourrissantes, les couleurs palpitantes de nos zébrures cachées? Où chercherons-nous nos lignes aventureuses, nos courbes vagabondes, nos élans
d'éclaireurs? Comment ferons-nous naître nos tableaux lyriques et nos mots d'intérieur?
En tuant le poète, l'artiste, le joueur, les silences éteignent trop vite les liesses et les larmes. Ils nivellent nos rêves, et font de
nous des êtres repliés sur l'hier déjà mort et le demain jamais.
Ils ont, il y a longtemps crucifié les printemps et ne savent même plus le rythme des saisons. Sur le calendrier des postes, ils n'écrivent plus rien, car l'objet n'est plus là que pour nous dire : « le facteur est passé ».
© Arthémisia - 06/11 comme suite à un billet de virtuelle
1460 - Les Mandarines séchées
En fuite, il fallait accrocher son regard, ancrer son corps pour éviter la dérive, peut-être s’écorcher un peu au nouveau, à la suie, au ciel, parmi l’étain éteint, et la rouille riante, survoler les toits têtus, les chapeaux aux allures de fleurs, sauter d’une arrogance à une autre, d’une individualité à une autre, se faire un nouveau champ d’action, rouge, orange, et rouge, encore.
Au loin, non : un gris verdâtre, vertical, qui sonne.
Et là sur l’aile, les doigts verts et griffus qui nous ancrent derrière la fenêtre, au bureau.
Et quelques mandarines séchées.
Pour ne pas sauter tomber dans le vide.
© Arthémisia – 06/11
Merci Thomas.
Avec : Toits aux mandarines séchées © Arthémisia - Feutre - 04/11
(Premier croquis de la vue de la loggia de mon nouveau chez moi.)
1459 - No place to go
Pour que tu m’entendes
Je ne te parle pas
Mes cheveux plein la bouche
Blanc est le goût de la nuit
No place to go
Le drap seulement
Je suis rentrée dans le silence
Je regarde les nuages glisser
La mer rouler
Les femmes courir follement après ce qu’elles ont de femmes
Les hommes cracher leur testostérone asphaltée
Je suis aveugle
Pas de leur monde
No place to go
© Arthémisia – 06/11
Avec : Tsugouharu FOUGITA – Nu à la toile de Jouy
1458 - Laurus nobilis?
Les lauriers que j’ai cueillis hier, aujourd’hui sont tous fanés.
C'est peut-être parce que je les ai volés?
© Arthémisia – 06/11
Avec : Nicolas POUSSIN – L’inspiration du poète.
1457 - Fragment de nuit ¹
Toulon, 22 juin 2011.
Le réveil doit sonner à 6 heures.
Mais il n’est que 3 heures. Les voisins m’ont réveillée. Ils s’insultaient.
Je les ai écoutés derrière la porte fermée.
Il est plus féroce que son chien.
Mais son chien est moins vulgaire. Ou moins camé.
Je regardais mon lit, le méchant plafond de polystyrène.
Décidément, je ne supporte pas le R&B.
J’ai écrit Je t’aime dans mon carnet. Au feutre rouge.
Mais qui es-tu ?
© Arthémisia - 06/11
¹ - Texte inspiré par la lecture du Silence de la langue de Richard BRAUTIGAN
Avec : Roy LICHTENSTEIN - Grrrrrrrr ! - 1965
1456 - Aveuglement
« Une fois qu’on déguste, la bouche est aveugle »
Caroline CHAMPION in Hors d’œuvre
- Essai sur les relations entre arts et cuisine
Edt Menu Fretin
Avec : Constantin BRANCUSI - Le Baiser (une des 6 versions)
1455 - La Nage
La large pluie musicale envahissait la vitre de coulures diaprées.
Cela projetait des bribes de lumières, des ombres sur ton corps qui te faisaient momie, faussement inondé, mais, silencieusement protégé dans un cocon mouvant.
Cela racontait une histoire, rythmée, des passages en creux et en vallées. Dévastés.
Et pourtant je n’ai jamais su à quoi tu pensais.
Il me semble que tu nageais.
© Arthémisia – 06/11
Avec : André KERTESZ – Le Nageur – 1917
1454 - Samedi
Comme suite à ça...
Je suis rentrée
En voiture
Dans la nuit
Avec ma peur
Au ventre
Je suis prête
A survivre
Le temps
Me suit
De près
© Arthémisia – 06-2011
Avec : Sophie CALLE – Birthday Ceremony – (1980) - 1997