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1727 - Sur le bout de la langue

Publié le par Arthémisia

Je suis sur le bout de ta langue.

Tu m’as sur le bout de la langue.

Je suis née de ton ventre, de tes tripes, de ton cœur. Et puis j’ai cherché la surface.

Au fond de ta gorge, je respirais ton air, et vibrais de tes mots. Je me suis lovée au lisse de tes joues, roulée dans tes papilles. Mais, je ne peux sortir. Tu me gardes sur le bout de la langue, bloquée, retenue, choisie, ferrée.

Tu ne me verras jamais face à toi. Dans cette découverte, tu risquerais la sidération.

Je ne viendrai jamais, ne deviendrai pas.

Tu ne risques rien ; tu ne prends aucun risque ; tu ne me dis pas.

Arthémisia © mai 2014

Avec : Le Petit Chanteur – Georges de La Tour

– vers1640 – Musée de Leicester

(À moins que l’œuvre ne soit de son fils Etienne…)

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1726 - Une Relation

Publié le par Arthémisia

…On fréquente les gens pendant des années, parfois des dizaines d’années, en s’habituant peu à peu à éviter les questions personnelles et les sujets réellement importants ; mais on garde l’espoir que plus tard, dans des circonstances plus favorables, on pourra justement aborder ces sujets, ces questions ; la perspective indéfiniment repoussée d’un mode de relation plus humain et plus complet ne s’efface jamais tout à fait, simplement parce que c’est impossible, parce qu’aucune relation humaine ne s’accommode d’un cadre définitivement étroit et figé. La perspective demeure, donc, d’une relation « authentique et profonde » ; elle demeure pendant des années, parfois des dizaines d’années, jusqu’à ce qu’un définitif et brutal (en général de l‘ordre du décès) vienne nous apprendre qu’il est trop dard, que cette relation « authentique et profonde » dont on avait caressé l’image n’aurait pas lieu, elle non plus, pas davantage que les autres…

 

Michel HOUELLEBECQ – Les Particules élémentaires

 

Avec : L’Arbre du pardon – Sir Edward BURNE-JONES - 1881

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