Petit pan de mur jaune avec un auvent, petit pan de mur jaune.
Nous nous y retrouverons.
Nous nous y retrouverons, en plein midi, sous le soleil plombé, atroce et insolent.
Nous nous y retrouverons, liquéfiés, suintant, exsudant tous nos muscs, nos ambres, nos iris, glissants de
notre envie, mouillant les corporels secrets de notre convoitise si longtemps retenue, imbibant nos veines et nos rides des sucs somatiques de nos déversements.
Enfin !
Petit pan de mur jaune avec un auvent, petit pan de mur jaune.
Nous nous y embrasserons, ruisselants, gonflés et carminés. Je la mordrai même cette lèvre si rêvée, si
entêtée, si alléchante, oui !alléchante ! Je la lècherai comme le premier fruit défendu, cette grenade vénusienne éclatante de jus, ce trou, cette embrasure de toi, et je m’y
faufilerai, anguille de ta bouche, à la recherche des râpures capricieuses de ta langue que tu n’oseras pas me donner, enfin pas tout de suite, mon chat.
Petit pan de mur jaune avec un auvent, petit pan de mur jaune.
Nous nous y caresserons, quand le toucher deviendra d’une nécessité absolue, quand les humeurs nacrées au
sortir de mon ventre viendront anéantir tes hésitations, quand de mes cuisses tu prendras la folie et que je n’aurai plus que ton dos pour me retenir sur terre.
Mais oui, c’est mon sexe qui caressera ta main, l’enrobera des sauces dont les femmes gardent le secret,
fera sa petite cuisine, celle des anges et des sorcières, celle dont tu raffoles et qui te désaltèrera, là en plein soleil, en plein midi.
Et le tien, fol animal soutenant la terre entière de son arrogante vision, je le caresserai aussi, fort,
si fort, si vite qui tu en crieras au soleil, à la vie.
Petit pan de mur jaune avec un auvent, petit pan de mur jaune.
Nous nous y aimerons, animaux, dans les cailloux, nous roulant dans la terre comme le font certains chiens
pour éliminer quelques parasites. Nous serons de poussière, liquides et telluriques, secrétant notre voracité de l’autre pour en laisser la trace sur un sol agité qui sera la mémoire stigmatique
de nos ébats non retenus. C'est là que je t’apprendrai mes écritures, mes indices, mes empreintes. Car il faut que nous laissions le vestige de nos corps au pied de ce petit pan
de mur jaune.
Je t’y attends.
Avec : Vue de
Delft - Jan VERMEER Van Delft