920 - 2 Heures de plus
Deux heures de plus. J'ai dormi deux heures de plus que d'habitude. Mon père me disait que quand on a des habitudes c'est qu'on vieillit.
J'ai donc dû rajeunir.
Un café.
Je me regarde dans la glace de la salle de bains.
C'est vrai que deux heures ça compte. Et que ça se voit.
Salle de bains. Salle de biens. Pour une
fois.
Mon sommeil a été si profond que quand j'ai ouvert les yeux, le réveil n'a fait que confirmer la sensation heureuse de plénitude de mon corps. D'ailleurs ils se sont ouverts tous seuls,
ces yeux là. Ce n'est pas ma pensée volontaire qui les a accompagnés. Ils voulaient s'ouvrir.
C'est tout de suite mieux quand le corps
veut.
Ce sommeil là, je ne m'en souviens pas. Il me semble qu'aucun rêve, qu'aucune agitation, ne l'a occupé. C'est un aplat, dont je ne saurais dire ni la couleur, ni l'odeur, ni le toucher. Quelque
chose d'assez proche d'un lac inerte et sombre peut-être ? Quelque chose sans bord, sans limite, qui aurait certainement pu durer encore longtemps. Quelque chose d'une mort en miniature. Pas
le passage de la vie à la non-vie, non. Je veux parler d'un état de repos, de paix, d'éternité.
Et je n'ai point rêvé. Encore moins cauchemardé. Juste dormi, je crois.
Je n'ai plus de mémoire. Seulement celle de l'instant de l'éveil. Pour l'avant, ma pensée se fabrique un néant impénétrable, car il faut bien imaginer d'où on vient ; mais au fond, ce n'est
qu'une image de l'abandon.
Copyright © Arthémisia - avril 2009
Avec : Tamara de LEMPICKA - Kizette sleeping -1934