160 - La Règle du jeu
Je vous avais promis de revenir vous parler de mes lectures...
Vous pouvez retrouver régulièrement mes impressions à chaud dans la catégorie "Rayonnages".
Depuis mi juin je me suis plongée avec une infinie délectation dans l’univers de Michel LEIRIS. Je vous en ai donné quelques extraits
récemment.
Je le connaissais déjà un peu à travers ses critiques d’art sur BACON (mon peintre préféré), et GIACOMETTI mais ignorais totalement son
intérêt pour la poésie.
J’ai donc commencé par un sublime recueil de poésies surréalistes Haut mal écrit à
l’époque où l’écrivain ethnographe, introduit en poésie par Max JACOB, adhéra au mouvement poussé par le peintre André MASSON. Cette première lecture m’a déjà fait découvrir une des
préoccupations majeures de LEIRIS : le mot. Il en joue à merveilles !
Désireuse d’en savoir un peu plus sur lui, je me suis attaquée à ce que j’ai du mal à définir comme une simple autobiographie :
La Règle du jeu. En quatre tomes (écrits sur 35 ans…) LEIRIS s’attaque à une entreprise esthétique, éloignée de toute narration,
en fouillant les expériences de sa vie et ceci sans suivre un parcours chronologique et surtout sans problématique narrative.
Dans le 1er tome, celui du souvenir, de l’enfance, LEIRIS tend des liens entre le passé et le présent et décortique les
révélations faites par le langage et leurs incidences actuelles. Quand on se passionne pour le pouvoir des mots, ce volume ne peut être que miel…
Dans le 2ème tome LEIRIS essaie de se convaincre – de nous convaincre ?- vainement de la possibilité de se jouer de la mort
en apprivoisant l’écriture…On y lira avec un plaisir proche de celui qu’on peut avoir devant une odalisque d’INGRES ou de DELACROIX les merveilleuses pages hautement lyriques de son aventure
en Afrique du Nord avec KHADIDJA sa maîtresse arabe que, Messieurs, vous auraient tous envie de connaître et qui malgré la rudesse de sa condition de prostituée, reste avant tout, excessivement
noble !!!
Le 3ème tome nous mène dans une réflexion sur le temps (Coucou Marcel !!), le temps du souvenir, le temps de l’écriture et le
temps de la lecture, ce temps contre lequel lutte tant LEIRIS ce qu’il le conduira jusqu’à un suicide (raté). Point de voyeurisme, cependant. Nous ne sommes pas chez Mireille Dumas ! Nous ne
sommes pas dans le récit mais dans l’analyse.
Dans le dernier tome, à mon humble avis le plus libre et donc mon préféré…LEIRIS nous prouve par l’exemple le pouvoir de la poésie sur la
logique. Il y mêle des poèmes, des réflexions, de courts textes dans une esthétique pleine d’air et de respirations.
A apprécier comme un éclairage très pointu et très personnel sur le vivre
poétique. N’oublions pas que LEIRIS est ethnographe…
Je viens de trouver l’adjectif qui convient pour définir ces 4 volumes : autobiographico-ethnographique !
« Ce livre, tissé de ma vie est devenu ma vie même.»
Copyright © Arthémisia - septembre
2006
Illustration : André MASSON – Portrait de Michel LEIRIS
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